De Chefsail à Sainte-Luce-sur-Loire

Au Moyen-Âge

Le territoire qui constitue la commune actuelle de Sainte-Luce-sur-Loire était appelé paroisse de Chefsail. Seule l’église portait le nom de Sainte-Lucie, la sainte à laquelle elle était dédiée. Au cours du XVe siècle, le territoire paroissial, dans son ensemble, fut désigné par le nom de Sainte-Luce. Et c’est ce nom qui demeure aujourd’hui.

Au Moyen-Âge, l’entité sociale de base était la paroisse (les communes furent créées par la Révolution française). On trouve dans les archives du IXe siècle, le nom de Chassiacum ou, selon les rédacteurs, Chezal, Chassalineum ou Chassaliacum pour désigner la paroisse qui correspondait à l’actuelle commune de Sainte-Luce-sur-Loire. Au XIe siècle, les rédacteurs écrivaient Chefsail, Chesail, Chessail, Chasseil ou encore Chefseil. Les archivistes Léon Maître et Paul de Berthou estiment que les dernières formes du nom ne dérivent pas des premières. Ils pensent qu’elles constituent une nouvelle dénomination qui leur a été substituée, et qui dérive de la source du Seil, ruisseau qui coule à l’ouest de la commune.

Chefsail

Chefsail ou Chesail désignait aussi le domaine que les évêques de Nantes possédaient sur cette paroisse, avec certitude depuis le XIe siècle, et peut-être même avant. Jusqu’au XIVe siècle, c’est ce nom qui désignait la paroisse. En effet, des documents datés de 1393 font état du ruisseau qui sépare Chefsail de Toéré (Thouaré).

L’église de la paroisse de Chesail était dédiée à Sainte-Luce (ou Lucie). Un document du XIIe siècle l’atteste : En 1137, l’évêque de Nantes, Brice, attribua les dîmes de l’église de Sainte-Luce de Chesail au chapître de la cathédrale Saint-Pierre. Toutefois, il est fort probable que le patronage de la sainte remontait bien au-delà. Progressivement, le nom de Sainte-Luce va se substituer au nom de Chesail. En 1467 et 1474, on trouve dans les archives pour la première fois le nom de Sainte-Luce pour désigner le territoire paroissial. Les raisons de ce changement ne sont pas connues. Peut-être voulait-on renforcer la protection de la sainte sur la paroisse ?

Après la Révolution

Les paroisses devinrent communes mais le nom de Sainte-Luce fut conservé. Plus d’un siècle après, au début de 1918, le préfet intervint auprès du maire de Sainte-Luce, Eudes de Frémond, pour que le nom de la commune soit complété afin d’empêcher toute confusion avec d’autres villes du même nom.

Le 23 juin 1918

Le conseil municipal décida d’ajouter la mention «sur-Loire». Cette mention fut ajoutée au nom de la ville par décret du Ministre de l’Intérieur en date du 18 avril 1920 et parut au Journal Officiel le 20 mai 1920.

Le château de Chassay :
de la résidence de campagne des évêques de Nantes à l’Hôtel de Ville

Vous saurez donc qu’au temps jadis, Chassay était l’habitation privilégiée, préférée et chérie des évêques de Nantes ; que c’était leur Versailles, leur palais d’été

Eugène Carissan Fils, professeur d’histoire.

Chassay, résidence des évêques de Nantes

Selon Eugène Carissan Fils, qui s’inspire des écrits des historiens Travers et Ogée, la construction d’un premier manoir remonterait à 550, année de l’accession de saint Félix au trône épiscopal de Nantes. Toutefois, aucun document d’archive ne l’atteste. En revanche, en 1076, l’évêque de Nantes, Quiriac, donna à son frère Benoist, abbé de la puissante abbaye de Sainte-Croix de Kemperlé, une de ses métairies à Chasseil (ancien nom de Chassay). Ce qui prouve qu’au XIe siècle, les évêques de Nantes possédaient des terres dans cette paroisse. Un autre document, daté de 1096, évoque le château que les évêques possédaient à Chasseil. En 1461 (date imprécise), l’évêque Amaury d’Acigné fit enclore le château de douves et de fortifications par peur des représailles du duc de Bretagne, François II, auquel il refusait de prêter serment de fidélité et d’allégeance. En 1462, suite à cette querelle, le duc de Bretagne confisqua tous les biens de l’évêché (y compris Chassay) et chassa Amaury d’Acigné de Nantes. Il semble que François II transforma alors Chassay en pavillon de chasse. Anne de Bretagne, fille de François II et reine de France, dut y résider à l’occasion. En effet, à la fin du XVIIIe siècle, un paysan découvrit (dans le chemin qui passe devant le château) une boucle de ceinture en or ciselé portant un chiffre et une inscription prouvant que l’objet appartenait à la duchesse Anne.

Chassay revint à l’évêché probablement en 1500, lorsque Guillaume Guéguen, protégé d’Anne de Bretagne, devint évêque de Nantes. L’évènement historique majeur que connut le manoir fut le passage d’Henri IV et de sa suite, le 13 avril 1598, qui vint dîner en compagnie de l’évêque avant son entrée à Nantes où il devait signer le célèbre édit (le 30 avril 1598).

13 avril 1598 : Henri IV est reçu à Chassay

Avant la signature de l’Édit de Nantes, Henri IV, roi de France, fut reçu au château de Chassay, le 13 avril 1598, à l’invitation de l’évêque Philippe du Bec. C’est un ouvrage collectif de 1882, Nantes et la Loire-Inférieure, qui apporte le plus d’informations sur la visite d’Henri IV à Chassay. En effet, dans cet ouvrage, considéré comme « l’un des grands classiques du régionalisme », un texte d’Eugène Carissan Fils retrace en détail l’histoire du Château de Chassay et du passage du roi : « Philippe du Bec, chaud royaliste, demanda au roi de vouloir bien honorer de sa présence sa terre de Chassay, (…) avant d’entrer à Nantes. Henry y déjeuna en effet, avec Nouel, archevêque de Reims, Charles Miron, évêque d’Angers, les ducs d’Elbeuf et d’Epernon, le comte de Schomberg et la charmante Gabrielle (d’Estrée). Les notables de Nantes vinrent y complimenter le roi, lui apporter les clefs de la cité et des présents pour Gabrielle (…) : un petit baril de noix confites, six paires de gants ambrés, des confitures sèches, et six oiseaux canariens merveilleusement apprivoisés, qui avaient coûté vingt livres parisis avec leur cage« .

Un château de style renaissance

Le corps carré au centre de l’édifice avec ses tourelles carrées en encorbellement date de la deuxième moitié du XVIe siècle car son architecture est de style renaissance italienne. Les deux ailes symétriques semblent avoir été ajoutées, peut-être autour de 1750. Vers 1600, l’évêque Charles de Bourgneuf de Cucé fit bâtir une chapelle qui n’existe plus aujourd’hui, mais qui se trouvait approximativement à une centaine de mètres au nord du château actuel. En 1683, dans les déclarations fournies par l’évêque de Nantes, Gilles de Beauvau, pour la réformation de ses domaines, on apprend que Chassay consistait alors en un manoir noble qu’il nommait « de Chessail » et un petit château qu’il nommait « de Chassais ». Le premier a disparu à une date indéterminée. Seul le petit château (l’actuel château de Chassay) a su résister au temps au milieu de son jardin et de ses larges douves. Le grand manoir était constitué de trois corps de logis contigus, et possédait de nombreuses dépendances : jardins, serre, métairie, pressoir, étables, écuries… Il semble qu’il était situé au nord du petit château qui constitue la partie ancienne de l’actuel hôtel de ville. Selon Raphaël de Bondy, la fontaine placée au centre du jardin côté ouest, possédait, pour les populations voisines la vertu de guérir les maladies des yeux.

Après La Révolution Française

Le 27 janvier 1791, le château, en tant que résidence épiscopale, et l’ensemble du domaine furent vendus comme bien national à l’armateur Dubois-Violette pour 109 000 livres. Celui-ci le revendit moins d’un an plus tard. Plusieurs propriétaires se succédèrent ensuite, laissant le château dans un état déplorable. Ils firent couper les plus beaux arbres du domaine pour payer leurs dettes, et, d’après les témoignages des anciens recueillis par l’abbé Grégoire (curé de Sainte-Luce de 1896 à 1907), l’un d’eux, pour échapper à ses créanciers, alla même jusqu’à faire enlever les deux passerelles jetées sur les douves et finit par se pendre dans une des salles. En 1827, Mme de Fresnais de la Briais, comtesse Charles de Bondy, acheta Chassay. La famille en resta propriétaire jusqu’en 1942, date à laquelle elle commença à vendre une partie du domaine par lot pour le maraîchage et le logement. C’est la famille de Bondy qui fit orner la façade côté jardin de ses blasons, de macarons et de têtes d’animaux (un sanglier, un chien, un renard et des lions). En 1956, Mme de Frémond vendit le domaine à l’union des seize coopératives de Loire-Atlantique qui y installa un centre d’élevage et d’insémination artificielle. Des bâtiments de fermes, des logements, des bâtiments administratifs, des stalles, des hangars et des rings d’exposition furent construits dans le respect maximum du site. Le centre accueillit jusqu’à cent reproducteurs. En 1974, la commune acheta le château 270 782 francs (les terrains et les bâtiments furent obtenus dans le cadre des équipements dus par les lotisseurs) et y transféra ses services en 1975. Celui-ci devint rapidement exigu pour les services municipaux d’une ville en plein essor démographique, et en 1987, la ville décida de réaliser un nouvel hôtel de ville dans le prolongement du château de Chassay. La partie moderne, dessinée par le cabinet 3A, est entrée en service en mars 1989 et a été inaugurée le 30 juin de la même année.

Ce château n’est pas classé aux Monuments Historiques, mais en tant qu’élément essentiel du patrimoine lucéen, il fait l’objet, dans les années 90, d’importants travaux de ravalement et de restauration.

La devise du château

La devise du château est inscrite sur le blason décorant le balcon situé au-dessus de la porte d’entrée, côté ouest. C’est la devise de la famille de Bondy, propriétaire du château de 1827 à 1956 : « Aspera non terrent » : « Ne pas craindre l’adversité ».

 

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Livret du Chassay

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